____....[RETOUR UNE]-•-[DOSSIERS]-•-[ARCHIVES]-•-[LEXIQUE]

* * * la presse * * *
Nous avons relevé dans sudouest.com du mercredi 21 janvier 2009, un article très intéressant qui nous montre comment on a laissé une ligne importante à l'abandon, la menaçant de fermeture, mais aussi comment les élus concernés s'y opposent.

Le train dans la vallée de la Nive
Photo Sud Ouest

Régime diesel
pour tenter de garder la ligne

Les élus veulent croire en la survie de la ligne basque

par Jacky Sanudo

La rame unique quitte Bayonne-Saint-Esprit. 15 tunnels plus loin, ponctués d’autant de coups de sirène, la voilà rendue en gare de Garazi, nom basque de Saint-Jean-Pied-de-Port. Kilométrage : 52,1. Nombre quotidien de rotations : huit. Durée du trajet : une heure et quart. Le voyageur prend le temps de compter les moutons à tête noire, sans s’endormir pour autant. Le paysage est de toute beauté. La voie longe, de bout en bout, une Nive montagnarde. Le petit train à crémaillère de la Rhune a de la concurrence.

L’été, la Bayonne--Saint-Jean-Pied-de-Port (inaugurée en 1898) fait le bonheur des touristes. Le reste du temps, elle est devenue le pire cauchemar de ceux qui sont censés l’entretenir.

Caténaires Midi

La voie unique électrifiée se trouve dans un état pitoyable. Les traverses ont 60 ans de moyenne d’âge, les ponts plus d’un siècle et le rail, dit de type double champignon et qui équipe toute la région, est dépassé. Un audit de RFF (Réseau ferré de France) a mis en avant des problèmes plus ou moins graves sur le RVB (rail, voie, ballast), les ponts et les petits ouvrages pour les écoulements des eaux.

Mais le pire est concentré sur ces fils conducteurs d’un peu plus d’un centimètre d’épaisseur. Les caténaires Midi, en arche, sont tellement vieilles que les agents SNCF n’arrivent plus à les régler. L’usure des pieds fait craindre leur chute. La ligne Bayonne--Saint-Jean-Pied-de-Port (1) cumule, en surmultiplié, tous les maux. La facture prévisionnelle pour la régénération de la ligne flirte avec les 100 millions d’euros. Si tout était refait à neuf, il faudrait en aligner 100 de plus.

Parer au plus pressé

Faute de budget immédiat, le train régional, qui n’a d’express que le nom, a vu sa vitesse ralentie de 70 à 50 km/h, le 25 avril 2006. Pis, il y a quelques semaines, les tractions diesel ont fait leur réapparition, faute de caténaires en état — l’une est d’ailleurs tombée sur un train en juin, sans faire de blessés. La SNCF a décidé d’arrêter l’exploitation électrique en décembre dernier. Pas question pour elle d’installer des caténaires neuves, dont le prix approche les 10 millions d’euros au kilomètre.

Pour parer au plus pressé, la Région a donc récupéré dans le Périgord des motrices diesel qui ont évité que le trafic soit interrompu. Question écologie, c’est moins terrible, d’autant que les pompes de ravitaillement en gazole sont à Pau et pas à Bayonne. Le bon discours qui veut que le train évite l’émission de CO2 dans l’air n’est pas de mise dans ce cadre bucolique.

« Jamais l’État, RFF ou la SNCF n’ont envisagé d’investir pour sauver ces petites dessertes régionales. C’est pourquoi, dans le contrat de projet État-Région Aquitaine 2007-2013, on trouve à la ligne “régénération” 146 millions d’euros. Même si les voies ne sont pas de notre compétence, nous avons décidé de mettre l’argent nécessaire pour éviter que ces lignes soient fermées avant 2020. Bien avant pour certaines d’entre elles », explique Daniel Province, responsable infrastructures et transports au Conseil régional.

Avec de tels crédits, on est loin du compte. Le Conseil régional a sollicité une petite rallonge de l’État dans le cadre de son plan de relance. « Midi-Pyrénées a obtenu des fonds qui lui ont permis de mettre en place un plan rail. Et il faut bien reconnaître que leur travail de régénération et de maintenance de voies est plus à la hauteur que le nôtre », admet Daniel Province. En revanche, le Conseil général des Pyrénées-Atlantiques ne s’est pas trop fait prier pour mettre la main à la poche.

« Ne pas nous oublier »

Mais qu’y a-t-il là-haut, à Garazi, pour susciter autant d’attention de la part des élus locaux ? « Nous souhaitons simplement le maintien du service public en milieu rural. Saint-Jean-Pied-de-Port, c’est aussi deux lycées avec 500 élèves et 35 000 pèlerins de Saint-Jacques qui transitent ici, dont 10 000 viennent par le train. Et puis, sur les 1 400 Saint-Jeannais, il y en a quelques-uns qui travaillent à Bayonne. Alors je reste optimiste, même si les gens de la côte veulent arrêter les frais à Cambo. Je n’accepterais pas qu’on nous oublie », affirme le maire de la commune, Alphonse Idiart.

Effectivement, la première tranche de travaux de maintenance prévue cette année ne concerne que le tronçon de 15 kilomètres Bayonne--Ustaritz--Cambo. Ils sont prévus sur un jour le 23 février et du 16 mars au 17 avril. Alphonse Idiart ne désespère pas de les voir arriver jusqu’à chez lui. En attendant, il doit se contenter d’une gare réhabilitée. Les toits ont été refaits fin 2008 et l’intérieur, la signalétique et les quais sont prévus pour ce premier trimestre. C’est acté. Et ce serait pour le moins un comble que la SNCF et RFF modernisent une gare qui n’accueillerait plus de trains.

_____

(1) Bayonne, Villefranque, Ustaritz, Jatxou, Larressore, Cambo, Itxassou, Louhossoa, Pont-Noblia-Bidarray, Ossès-Saint-Martin-d’Arrossa et Saint-Jean-Pied-de-Port.

Auteur : Jacky Sanudo

j.sanudo@sudouest.com

Remarque de l’opérateur de ce site

L’article ci-dessus fait référence aux jacquaires, ces marcheurs de Compostelle. J'ai été l’un d’eux. En 2002, venant à pied de Roncevaux, je suis arrivé en sueur à la gare de Saint-Jean-Pied-de-Port pour prendre mon billet afin de me rendre à Périgueux où j'avais laissé mon automobile vingt jours auparavant. On m'offrait même de m'avancer à Niversac, bien plus pratique pour moi. À Donibane Garazi, j’ai vu des partants et des arrivants, certains avec des bicyclettes, d'autres arrivaient du Brésil et des Amériques par l'aéroport de Biarritz et énormément d'Espagnols qui n'ont que cette solution pour réaliser el Camino Francés completo, car il n'y a pas de gare à Roncesvalles.

Eh bien, il y a une route de Compostelle antique qui passe par Oloron et Canfranc, elle se nomme « la voie du Somport » ou « el Camino Aragonés », dont les étapes principales sont ici Saint-Christau, Sarrance, Bedous, Sainte-Christine du Somport (12e siècle) puis, au-delà, Jaca dont le nom même fait référence à Jacobus, San Juan de la Peña et enfin Puente la Reina.

Il est incontestable que les pèlerins modernes, qui sont le plus souvent des randonneurs au long cours, guettent toutes les gares ferroviaires qui sont sur leurs parcours. On pourra alors le mesurer dès que Bedous retrouvera son train, électrique ou non.

Chr. Lamaison